••• « Ne pas attendre des attaques »

Publié le 24-03-2021 06:46:00
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Avez-vous été surpris par la découverte d'un loup à Lathus-Saint-Rémy la semaine dernière?

Farid Benhammou, docteur en géographie et environnement à l'Université de Poitiers, spécialiste de la cohabitation avec les grands prédateurs (loup et ours). « Non. Il y avait de fortes suspicions ces dernières années. Nous sommes dans une zone de passage. Mais des loups sont peut-être installés. Il n'y a pas assez de pression de suivi pour en être sûr. Dans la Brenne, les brandes du Poitou, le camp militaire (entre Montmorillon et Saint-Leomer), le loup a pu s'adapter sans attirer l'attention, tant qu'il a de la faune sauvage à se mettre sous la dent. »

Que change le caractère désormais avéré de la présence du loup dans la Vienne?

« Il est temps que tous les acteurs se mettent autour de la table. Pour l'instant, il ne s'est encore rien passé de grave... sauf pour ce loup. Il ne faut pas attendre des attaques de troupeaux, qui sont des drames pour les éleveurs. Il faut profiter de cette occasion pour initier des travaux, des discussions, des évaluations de manière dépassionnée, dans la sérénité. C'est le bon moment. »

Qui sont ces acteurs?

Le monde de l'élevage, les chasseurs, services de l'état, scientifiques, naturalistes, les élus qui ont un rôle d'arbitre. Il ne faut pas avoir une vision angélique du loup, ni s'y opposer par tous les moyens. Il est difficile d'empêcher le loup de s'installer, mais on peut lui apprendre à ne pas toucher aux élevages.

De quelle façon?

« Il y a des expériences en France, y compris avec des éliminations ponctuelles de loups ou des tirs non mortels, par lesquels le loup apprend qu'il n'a pas intérêt à s'attaquer aux troupeaux, et transmet cette habitude. Il faut adapter l'élevage aux loups et obliger les loups à s'adapter. L'élimination systématique n'est pas durable (l'espèce est de toute façon protégée) et nécessiterait de gros moyens. Il serait plus pertinent de consacrer ces moyens chez les éleveurs, pour travailler avec les experts sur des solutions efficaces. Il y a une tradition d'adaptation chez les éleveurs du Montmorillonnais. »


Propos recueillis parSébastien Kerouanton